Au moment où le gouvernement norvégien recommande au Fonds souverain norvégien, le plus grand fond souverain du monde, de désinvestir tous ses avoirs, d’une valeur de près de 40 milliards de dollars, des industries pétrolière et gazière ; la majorité parlementaire en France prend une double responsabilité en vidant de son sens le contenu de la proposition de loi sur la transparence et le désinvestissant de l’épargne populaire : nous rapprocher d’une double crise, climatique et financière.
Tard dans la soirée, la proposition de loi déposée par Elsa Faucillon a été votée à l’Assemblée Nationale, sans les voix des députés qui l’avait initiée, mais avec celle de la majorité qui l’avait vidée de toute substance (1). Co-signée par 25 député.e.s, cette proposition de loi se voulait une traduction législative de la campagne #PasAvecNotreArgent menée par Attac et 350.org, afin que l’épargne collectée par la Caisse des dépôts et consignations (livrets de développement durable et solidaire, Livrets A) ne serve plus à financer des entreprises et des projets liés aux énergies fossiles.
Nous savons depuis longtemps que la majorité présidentielle ne fait pas partie des “leaders”, mais elle a fait hier la démonstration qu’elle est désormais l’arrière-garde face à la dynamique portée par la jeunesse et la société civile. Nous la tiendrons pour responsable lors du printemps climatique et social qui s’annonce.” commente Clémence Dubois, porte-parole pour 350.org
Ce dernier mois, en amont de l’examen du texte, plus de 11 000 personnes avaient participé à la campagne de mobilisation en envoyant une lettre aux parlementaires, en les interpellant devant leur permanence parlementaire, sur leur compte facebook ou twitter pour les exhorter à respecter les engagements de la France en matière climatique. Pour leur première action de désobéissance civile depuis le début du mouvement de la jeunesse pour le climat, les étudiant.e.s franciliens avaient également exhorter la Caisse des dépôts à désinvestir.
Le jour même, à l’appel de quatorze organisations de la société civile, plus de 150 personnes s’étaient réunies devant l’Assemblé Nationale pour montrer aux député.e.s leur détermination à ce qu’ils votent la proposition de loi pour la transparence et le désinvestissement des combustibles fossiles de l’épargne populaire. Munies de pancartes “Zéro Fossile”, “Pas Un Euro de Plus” etc, ils ont dessiné le choix auquel les parlementaires seront confrontés : “Nous ou les énergies fossiles ? Epargner le climat ou Fossiliser Notre Avenir ?”. Ils ont été rejoints par Elsa Faucillon, Mathilde Panot et Dominique Potier.
Le même jour, Emmanuel Macron se déplaçait dans le cadre du grand débat sur la transition écologique.
“Contraindre les institutions financières à arrêter de financer les énergies fossiles ? Non, selon Emmanuel Macron, la solution au dérèglement climatique repose d’abord sur chacune et chacun d’entre vous ! C’est pourquoi les députés de la majorité ont totalement vidé de sa substance la proposition de loi Faucillon” réagit Raphael Pradeau, porte-parole pour Attac France
La mobilisation citoyenne avait pourtant rappelé aux parlementaires le retard inacceptable pris par l’Assemblée Nationale, qui avait adopté, un mois avant la signature de l’accord de Paris, une résolution pour une société bas carbone, dans laquelle elle « encourage les investisseurs institutionnels, les entreprises, notamment celles dont l’État est actionnaire, et les collectivités territoriales à cesser d’investir dans les énergies fossiles ».
Depuis le début du mouvement en 2012, plus de 1 000 institutions dont les investissements gérés totalisent plus de 8 000 milliards de dollars se sont engagées à se désinvestir des entreprises de combustibles fossiles telles qu’Exxon, Total ou Shell. Au cœur de ces engagements, il y a un mouvement populaire – des citoyens ordinaires qui poussent leurs institutions à prendre position contre le secteur des combustibles fossiles – le secteur le plus responsable de la crise climatique actuelle.