par Aaron Packard

Un objectif est réapparu au centre des débats de la COP21 : 1,5 degré Celsius. Ce chiffre est mentionné depuis des années, mais avant cette COP, il faisait uniquement partie des priorités d’une coalition de petits États insulaires et de pays vulnérables. Cette coalition bénéficie désormais du soutien de nouveaux pays, tels que le Canada, l’Australie, la France, les États-Unis et la Chine. Il y a de grandes chances qu’il figure dans le texte final qui ressortira des négociations. Ce chiffre mérite trois commentaires importants:

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La bonne nouvelle : 1,5 °C, c’est préférable pour toute la planète, pas uniquement pour les petits États insulaires

Cet objectif chiffré est généralement avancé, car il donnerait aux atolls de faible altitude une meilleure chance de survie par rapport à l’objectif des 2 °C. C’est vrai. Mais il manque une information, un réchauffement de 2 degrés serait extrêmement préjudiciable pour un petit État insulaire comme pour un grand pays développé. Nous devons reconnaître le fait qu’une hausse de 2 degrés n’a jamais été le garant de notre sécurité climatique. Cela représente en fait le seuil entre un changement climatique « dangereux » et un changement climatique « extrêmement dangereux ».

En limitant la hausse à 1,5 degré, nous multiplions les probabilités de survie et de prospérité de centaines de millions de personnes aux quatre coins du globe. Qu’il s’agisse d’une réduction de l’exposition à des sécheresses, à des inondations de grande ampleur, à une propagation des maladies, à des typhons intenses ou à une hausse du niveau de la mer, les études scientifiques concluent que les préjudices seraient bien plus faibles en limitant la hausse à 1,5 degré.

1,5 degré, c’est une hausse préférable pour chacun d’entre nous et nous devrions remercier les petits États insulaires tels que les îles Marshall pour leur leadership incroyable en faveur du retour dans les débats de ce chiffre.

1,5°C : un réchauffement à l’impact majeur 

Il a été annoncé cette année que le réchauffement d’origine anthropique avait atteint 1 degré sur la planète depuis 1880. Le coût de ce réchauffement est bien documenté et fait mal!

Des experts scientifiques de l’université de Columbia ont publié une étude qui conclut que le réchauffement climatique en Californie avait aggravé de 8 à 27 % la sécheresse entre 2012 et 2014. En 2015 uniquement, la sécheresse en Californie a coûté à l’État 2,7 milliards de dollars et a conduit à la disparition de 21 000 emplois. Au-delà de cela, des milliers de personnes ont souffert de graves préjudices et des difficultés personnelles.

Dans le même temps, l’Éthiopie et une grande partie de la Corne de l’Afrique souffrent actuellement de la pire sécheresse depuis 50 ans. 10,1 millions de personnes vont souffrir d’une grave pénurie alimentaire en 2016 et 400 000 enfants vont être exposés à un risque de malnutrition aiguë. Le réchauffement de la planète a un impact différent sur l’intensification de la sécheresse en Éthiopie.

Les conditions météorologiques extrêmes surviennent désormais dans un contexte climatique plus chaud, plus humide et plus sévère.

Nous ne pourrons limiter la hausse à 1,5 °C qu’à condition de laisser les combustibles fossiles sous terre.

Cette affirmation est succincte, mais les mesures politiques s’y rapportant sont longues et entachées d’irrégularités. Pour limiter la hausse à 1,5 °C, une seule mesure fonctionnera : laisser les combustibles fossiles sous terre, sans demi-mesure.

D’après le cinquième rapport d’évaluation du GIEC, la quantité totale d’émissions de dioxyde de carbone autorisées entre 2011 et 2100 devrait être simplement de 550 gigatonnes pour conserver une chance sur deux de limiter la hausse des températures à 1,5 °C.

Si toutes les réserves de combustibles fossiles sont brûlées d’ici 2050, nous dépasserons un volume de 2 900 gigatonnes. De plus, nous dégageons des quantités importantes de CO2 en raison de la déforestation et de la production de ciment alors que la hausse continue des émissions des autres gaz à effet de serre tels que le méthane rend encore plus difficile l’atteinte d’un objectif de 1,5 °C.

J’ai fait un rapide calcul:  nous devons laisser entre 85 et 90 % des réserves combustibles fossiles sous terre (selon une estimation prudente) pour garder une chance sur deux de limiter la hausse des températures à 1,5 °C. Dans le même temps, nous devrons inverser le phénomène de déforestation rapide en développant de nouveaux puits de carbone forestiers et en réduisant les émissions issues de l’agriculture. Si nous ne le faisons pas, nous devrons laisser davantage de combustibles fossiles sous terre.

Dans un article publié dans The Hindu, un groupe d’experts scientifiques a souligné le véritable défi que nous devrons relever pour atteindre cet objectif :

« Notre potentiel d’émission de carbone pour atteindre une hausse de 1,5 °C est tellement infime que les pays développés ne devront plus atteindre zéro émission dans les cinq à dix prochaines années. Les pays en développement auront un peu plus de temps devant eux, mais ce délai sera tellement limité qu’ils auront besoin d’un énorme soutien sur le plan financier et technologique pour réduire la pauvreté et atteindre un niveau de développement élémentaire tout en respectant le budget carbone disponible. »

L’engagement politique devra être solide pour transformer de manière aussi rapide et profonde notre système énergétique mondial. L’accord de Paris comprendra peut-être un objectif à 1,5 °C, mais les moyens d’atteindre cet objectif feront terriblement défaut. C’est pourquoi 350.org intensifiera ses efforts dans les mois qui suivront les négociations de Paris pour laisser les combustibles fossiles sous terre. Préparez-vous à participer à des mobilisations audacieuses !

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