Chaque année dans le monde, des centaines de personnes sont tuées et des milliers d’autres subissent des intimidations et des menaces pour avoir tenté d’empêcher l’exploitation des ressources environnementales.
Alors que gouvernements doivent prendre des mesures fermes pour atteindre les objectifs de base en matière de changement climatique, et adopter un modèle de développement plus durable (conformément aux Objectifs de développement durable), c’est le contraire qui se produit : les entreprises productrices de combustibles fossiles, les sociétés minières, les projets de développement agricole et les exploitants forestiers s’avancent de plus en plus loin dans les territoires des peuples autochtones et exploitent les derniers habitats naturels.
Résultat ? Des zones de conflits dans le monde entier, où la résistance non violente à l’expansion de ces entreprises est violemment réprimée.
En 2016, l’ONG Global Witness a signalé la mort de 185 défenseurs de l’environnement. Ces personnes sont coincées entre les entreprises qui cherchent à maximiser leurs profits et l’incapacité des gouvernements à protéger leurs citoyens. Les défenseurs de l’environnement doivent être protégés lorsqu’ils travaillent – car ils font un travail est essentiel au nom de tous – et voilà également pourquoi nous nous devons d’informer le monde entier sur leurs luttes.
Ci-dessous, six histoires de citoyens ordinaires qui subissent des intimidations et des menaces, ou qui soutiennent des défenseurs de l’environnement menacés. Ces témoignages ont été enregistrés fin 2016 dans le cadre des négociations sur le climat de la COP22 à Marrakech, au Maroc. Nous sommes solidaires avec eux et avec tous ceux et celles qui continuent de lutter en dépit des menaces.
Roberto Marques est l’un des chefs du peuple Anacé au Brésil. Sa communauté s’est battue contre l’installation sur son territoire d’une usine hydroélectrique et d’une centrale à charbon, et contre le développement de la fracturation hydraulique au nord-est du Brésil.
« Je n’étais pas présent à ce moment-là, mais la police est entrée sur notre territoire en possession d’un permis émanant d’une autorité dont l’identité ne nous avait pas été divulguée. » C’était l’heure du déjeuner, et ils ont renversé le repas de notre chef – mon père – et d’autres personnes âgées. Ils l’ont arrêté et emmené au poste de police. J’ai été choqué par ce récit, parce que cela aurait pu m’arriver et qu’il est un membre très important de la communauté… J’avais l’impression de ressentir ce qu’il avait vécu. »
L’expérience de Roberto est malheureusement terriblement courante au Brésil, particulièrement au sein des populations autochtones, et bien trop souvent, les tentatives d’intimidation débouchent sur des meurtres. Près de 50 personnes ont été tuées au Brésil en 2015, simplement pour avoir protesté contre le développement pernicieux de l’exploitation minière et forestière et d’autres grands projets sur leurs territoires. Ce taux est le plus haut au monde.
Face à ces menaces, des ONG comme Amnesty International et Global Witness, qui offrent une solidarité internationale et un soutien local aux personnes exposées, peuvent aider à assurer leur protection.
Originaire du Burundi, Landry Nintertse est le chef d’équipe de 350.org Afrique. Être un activiste est très risqué dans de nombreuses régions d’Afrique. Les intimidations et les menaces de violence sont courantes dans les pays où les combustibles fossiles et les compagnies minières ont le pouvoir de corrompre les gouvernements.
« Les défenseurs de l’environnement qui protègent les ressources naturelles d’Afrique sont en permanence harcelés, intimidés, parfois détenus ou forcés à l’exil à cause de leur militantisme.
… la plupart des pays disposent d’une constitution qui protège l’ensemble de leurs citoyens… mais une constitution écrite est une chose, sa mise en œuvre une autre. »
La protection des défenseurs de l’environnement, comme Nintertse le souligne, nécessite non seulement une solidarité internationale, mais également de faire pression sur les gouvernements et les entreprises au niveau local et international pour garantir la sécurité de toute personne qui s’oppose à leurs projets. Dans de nombreux pays, c’est un combat incessant, et il y a encore beaucoup à faire.
Hindou Oumarou Ibrahim est membre la communauté pastorale Mbororo, au Tchad. Elle co-préside le Forum international des peuples autochtones sur les changements climatiques, qui constitue le conseil des peuples autochtones à la CCUNCC. Elle ne cesse de se battre pour que les droits des défenseurs de l’environnement soient entendus et pour que les abus qu’ils subissent soient rendus visibles au niveau international.
« Défendre les droits des défenseurs de l’environnement, c’est d’abord défendre leur liberté d’expression. Nous devons nous assurer que leur message se répande et soit entendu.
Outre les médias, chaque individu peut parler des risques encourus par les défenseurs de l’environnement. Par exemple, lorsqu’un militant est arrêté, cela n’est pas relayé dans la presse.
Lorsque nous nous battons pour la défense de l’environnement, nous ne prenons pas notre propre défense, nous prenons la défense du monde entier. »
Les défenseurs de l’environnement sont aux avant-postes de la lutte pour mettre en place l’accord de Paris sur le climat : ils empêchent souvent le développement des projets qui doivent être stoppés pour atteindre des objectifs climatiques ambitieux et, comme le dit Ibrahim, ils le font pour nous tous. Lorsque les gouvernements échouent à protéger les droits des défenseurs de l’environnement, c’est aux populations elles-mêmes d’assurer leur protection. Gagner la protection des défenseurs de l’environnement, c’est aussi gagner la bataille contre le changement climatique.
Basée aux Philippines, Victoria Tauli-Corpuz est la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Son travail consiste à défendre les droits des peuples autochtones et à rédiger des rapports sur leurs droits, destinés aux gouvernements du monde entier. Les peuples autochtones sont disproportionnellement touchés par l’exploitation minière et forestière.
« Les peuples autochtones ont le droit de continuer de vivre sur leurs terres et de mener la vie qu’ils veulent. Chaque jour, je reçois trois ou quatre lettres relatant l’arrestation d’un autochtone, l’incendie d’une communauté ou des populations déplacées… C’est une réalité ; il est par conséquent impératif d’agir…
La présence d’organisations telles qu’Amnesty International a sans aucun doute permis de défendre les droits des populations dans ces situations… et il est de notre devoir d’élargir la portée des organisations qui protègent les défenseurs de l’environnement. »
Les Nations Unies restent un mécanisme de protection des défenseurs de l’environnement important. La solidarité internationale a en outre un rôle énorme à jouer. Nous devons faire savoir aux entreprises et aux gouvernements qu’ils ne peuvent pas tuer, massacrer, ou menacer ceux et celles qui se mettent en travers de leur route. Des milliers de partisans de 350.org s’organisent dans des situations précaires où la protection des droits humains n’est pas garantie. Nous sommes en capacité de défendre leur liberté d’expression et de défendre leurs droits en parlant de leur situation au niveau international, en partageant leurs histoires et en organisant des actions de solidarité et des rassemblements en cas de besoin. Vous pouvez rejoindre un groupe militant local ou lancer votre propre groupe s’il n’en existe pas près de chez vous ici. Inscrivez-vous à notre liste de diffusion pour recevoir les dernières nouvelles ici.