Quand la COP29 s’est ouverte le 11 novembre en Azerbaïdjan, nous savions que les gouvernements des 197 États représentés et l’Union européenne avaient UNE tâche précise et cruciale à accomplir : trouver un accord sur un « Nouvel objectif collectif de financement climat » (alias NCQG si vous aimez les sigles de la COP). En résumé, cela signifie que les pays riches et pollueurs du Nord global doivent débloquer de l’argent pour financer une transition rapide et juste vers les énergies renouvelables et l’adaptation dans les pays les plus vulnérables au changement climatique.

Les négociations ont été tendues. Quelques heures avant la clôture de la conférence, les délégations des petits États insulaires (AOSIS) et des pays les moins avancés (PMA) ont claqué la porte des négociations, affirmant que la présidence azerbaïdjanaise ignorait leurs demandes. Et quand le texte final a été présenté, il était bien en-dessous des attentes :

Les pays vulnérables n’ont pas eu d’autre choix que d’accepter un mauvais accord. L’objectif de mobiliser 300 milliards de dollars par an d’ici 2035 remplace celui de 100 milliards fixé il y a 15 ans. Il reste très largement insuffisant pour aider les pays vulnérables à s’adapter aux impacts climatiques qui se multiplient et s’accélèrent, à passer aux énergies renouvelables et à garantir une réponse juste et équitable à l’urgence climatique.

Vidéo récapitulative de nos mobilisations durant la COP29. Cliquez sur l’image pour la visionner !

Des financements climat efficaces et à la hauteur : ça ressemble à quoi ?

Les pays développés ne se sont engagés à débloquer que jusqu’à « au moins 300 milliards de dollars par an ». Pire encore, cette somme inclut argent public et privé. Cela risque d’aggraver le fardeau de la dette des nations les plus vulnérables qui paient déjà le prix de la crise climatique. Notre mouvement réclame au moins 1 000 milliards de dollars par an d’ici à 2030 via des financements de qualité. Tout montant inférieur ne pourra ni instaurer la justice climatique ni répondre aux besoins des personnes les plus affectées par les impacts climatiques.

Ce que nous demandons, c’est une finance climat qui assure :

  • Des dons, pas des prêts à taux d’intérêt élevés. La justice climatique exige que la finance donne la priorité aux dons plutôt qu’aux prêts afin d’éviter de creuser davantage la dette des pays vulnérables, et que les fonds publics prennent le pas sur les investissements privés qui privilégient les profits au détriment de l’humain.
  • Des engagements transparents et sur lesquels il est possible de demander des comptes. Les financements climat doivent être déboursés rapidement et de manière transparente. Toutes les personnes concernées, en particulier les populations locales, doivent pouvoir accéder facilement et équitablement aux informations pertinentes.
  • L’initiative locale. Pour obtenir des changements significatifs, il est urgent de répondre au contexte et aux besoins locaux. Les populations doivent être directement impliquées, s’approprier le projet et exercer un pouvoir de décision à toutes les étapes.
  • De l’argent pour de vraies solutions. Toute solution qui prolonge l’utilisation des énergies fossiles ou qui implique un risque sociétal élevé est en contradiction avec le principe d’une transition juste et rapide vers les énergies renouvelables.

Nous savons que l’argent pour rendre tout cela possible existe. Il faut juste l’investir au bon endroit : mettre fin aux investissements et aux subventions pour les énergies fossiles polluantes et taxer les ultra-riches permettrait de collecter des milliers de milliards de dollars chaque année, permettant ainsi de débloquer des fonds essentiels pour protéger le climat, renforcer les services publics et rendre les communautés plus résilientes, plus justes et plus durables.

Action menée à la COP29 pour réclamer des Plans nationaux énergie-climat bien plus ambitieux. Photo : Masayoshi Iyoda / 350.org

Nous ne lâchons rien 

Malgré les résultats extrêmement décevants de la COP29, nous ne lâchons rien. Pendant toute la durée du Sommet, nous avons démontré notre force, en Azerbaïdjan et à travers le monde :

  • Nous avons prouvé, une fois encore, que notre mouvement est déterminé et puissant. Des millions de personnes se sont mobilisées à travers le monde afin de faire monter la pression en faveur d’engagements climatiques ambitieux mais aussi afin de faire payer aux pays riches leur dette envers les pays les plus vulnérables au changement climatique.
  • Nous avons fait entendre notre voix dans les couloirs des négociations, au coeur du pouvoir. Nous avons organisé et participé à plusieurs conférences de presse et actions à Bakou, et demandé à des pays influents comme les Emirats Arabes Unis et le Brésil de se fixer des objectifs plus ambitieux en matière de développement d’énergies renouvelables et de sortie des énergies fossiles.
  • Nous avons réclamé une véritable justice énergétique. Nous avons lancé « L’énergie des peuples », une campagne citoyenne pour une énergie propre et fiable dans l’Amazonie brésilienne. A cette occasion, nous avons rappelé qu’une transition juste n’est pas qu’une question d’énergie mais aussi de droits humains, d’inclusion et de changement systémique qui permettent aux populations de prendre leurs propres décisions en matière de choix énergétiques.
  • Nous l’avons dit haut et fort : les milliardaires doivent payer pour financer l’action climatique. Nous avons lancé le dossier Taxons leurs milliards, qui démontre qu’avec un impôt sur la fortune des ultra-riches, les gouvernements pourraient non seulement collecter les milliers de milliards nécessaires pour répondre à la crise climatique, mais aussi pour réduire les inégalités entre les plus riches et les plus pauvres.
  • Nous avons demandé à ce que les bonnes personnes prennent les commandes des COP. Bien que les lobbyistes des énergies fossiles aient largement dépassé en nombre les délégations des 10 pays les plus vulnérables pendant la COP29, nous avons farouchement défendu l’émergence d’un leadership autochtone comme une chance de changer l’équilibre des pouvoirs. Nous soutenons l’appel lancé par les peuples autochtones, gardiens originels de notre planète, pour qu’ils dirigent les négociations mondiales sur le climat au Brésil et en Australie, et la campagne du mouvement autochtone brésilien « Nous sommes la solution », à travers laquelle il réclame la co-présidence de la COP30 au Brésil.

Lancement de la campagne « Nous sommes la solution », à Rio de Janeiro, au Brésil. Photo : APIB

La finance climat n’est pas de la charité : c’est une dette que les pays riches et pollueurs ont vis-à-vis du reste du monde et un investissement pour notre avenir. Nous n’accepterons pas un paiement partiel.

Nous sommes prêt·es pour la justice climatique. La révolution vers les énergies renouvelables est déjà en route et est inarrêtable. Nous y travaillons. L’an prochain, nous redoublerons d’efforts pour renforcer le pouvoir citoyen. Avec nos partenaires, nous menons des campagnes pour la mise en place de solutions d’énergie renouvelable citoyennes et pour l’instauration d’un impôt mondial sur la fortune ciblant les milliardaires et les géants fossiles qui financera ces solutions.

En avril 2025, nous organisons un rassemblement de plus de 200 activistes et leaders du climat au Brésil, pour lancer une nouvelle vague de campagnes et de mobilisations dédiées à l’accélération du déploiement de solutions à la crise climatique. Lors de la COP30 qui aura lieu en Amazonie brésilienne fin 2025, nous veillerons à ce que les bonnes personnes assurent la co-présidence de ces négociations déterminantes pour le futur de notre planète : non pas les lobbyistes des énergies fossiles, mais les peuples autochtones. Et nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour que les demandes des petits États insulaires en développement, des États du Sud global et du mouvement international pour le climat soient pleinement prises en compte.

C’est au tour des gouvernements de faire preuve d’ambition!

Nous devons veiller à ce que la lutte pour rester sous 1,5°C de réchauffement climatique reste prioritaire, et cela implique beaucoup plus d’ambition et beaucoup plus vite ! Les nations ont encore l’opportunité de se montrer à la hauteur de l’urgence climatique, en proposant de nouvelles Contributions déterminées au niveau national (CDN), qui sont les plans d’action climat de chaque pays, contenant notamment leurs objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre et de développement des énergies renouvelables.

D’ici février 2025, les pays sont supposés transmettre de nouvelles CDN pour la période 2025-2035. Ces nouveaux plans d’action sont extrêmement importants car ils vont nous guider dans ce qui pourrait être notre dernière chance d’avoir une planète vivable pour tou·tes. Les regards sont maintenant tournés vers le Brésil. En tant que pays hôte de la COP30, il peut pousser les autres pays à adopter des plans d’action ambitieux dans les prochains mois.

« Après trois ans de conférences internationales pour le climat organisées dans des pays grands producteurs de pétrole, il est temps de rectifier le tir. La COP de l’an prochain en Amazonie brésilienne sera une chance unique de mettre les populations locales, les solutions et une énergie renouvelable accessible au premier plan des discussions. Les peuples autochtones du Brésil montrent la voie à suivre mais il faut que le gouvernement leur emboîte le pas. » 

– Ilan Zugman, Directeur de 350.org pour l’Amérique latine et les Caraïbes 

Le Brésil doit s’affirmer comme le leader climatique dont nous avons besoin dès maintenant, pour que la lutte pour la justice climatique, les droits humains, et une forte coopération internationale soient le fil rouge qui nous guide vers la COP30. Le Brésil doit appeler nos gouvernements à relever le défi et à faire preuve de plus d’ambition climatique ! Leur responsabilité est en jeu.

Nous ne lâcherons rien.

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